Dans le dernier article on a vu quelle forme concrete prenait un extremum local dans nos algorithmes génétiques: les chromosomes tendent à devenir identiques. On doit maintenant comprendre pourquoi on bloque sur un extremum local dans ce problème particulier des 8 dames, alors qu’on avait bien supprimé ce souci dans le paradoxe du singe savant.

On reprend le code pour le paradoxe du singe savant et on modifie la méthode run de la classe GeneticAlgorithm pour inspecter l’état des chromosomes une fois la solution trouvée:

  def run
    @generations.times do |generation|
      Evaluator.new(@search_value, @population).evaluate
      best = @population.best
      # display(generation, best)
      # exit if best.score == @search_value.size
      if best.score == @search_value.size
        @population.each {|i| p i.chromosome}
        exit
      end
      next_generation
    end
  end

En se servant du petit script d’analyse du dernier article, vous vous apercevrez que pratiquement chaque chromosome est unique. Pourquoi cela fonctionne ici et pas là ?

Lorsque, dans le paradoxe du singe savant, on mute une phrase, chaque mutation a une chance réelle d’améliorer la phrase. Bien sûr, pour améliorer la phrase, il faut que toutes les conditions soit réunies. Il faut premièrement, que le gène qui mute soit un «mauvais» gène et deuxièmement, que le remplaçant soit un «bon» gène. Par contre, quelque soit le gène mutant, les autres gènes n’entrent pas en ligne de compte. Dans la phrase, chaque gène est totalement indépendant des autres. Voici un exemple pour clarifier mon propos. On cherche la phrase “bonjour” et on a pour l’instant ceci:

xxxxxxx

Cette phrase n’a que des mauvais gènes, son score est de zéro. Si on mute le premier gène en “b”:

bxxxxxx

La phrase s’est améliorée, son score a augmenté. Vous remarquez que quelque soit les autres gènes, bons ou mauvais, le score augmente de toutes manières de 1. C’est ce que j’appelle des gènes indépendants.

Dans le problème des 8 dames, c’est très différent. Il me manque malheureusement les outils mathématiques et/ou statistiques pour conceptualiser tout ça mais je vais néanmoins essayer d’expliquer. Lorsqu’on déplace une dame sur le plateau, c’est à dire quand un gène mute, son déplacement à un effet potentiel sur les autres dames, elle peut entrer en conflit avec une ou plusieurs. Donc dans le problème des 8 dames les gènes sont dépendants les uns des autres. On ne peut pas en muter un sans affecter potentiellement les autres. Ça signifie qu’il doit y avoir certains chromosomes pour lequels la mutation d’un seul gène, quel qu’il soit (ou même de plusieurs en augmentant la taille de l’échiquier), ne peut pas améliorer ce chromosome. Comme le taux de mutation doit être petit pour permettre l’exploitation des chromosomes, la probabilité qu’un chromosome voit suffisament de ses gènes mutés comme il faut est infime, quasi-inexistante.

J’espère avoir été suffisament clair, n’hésitez pas à me demander des précisions le cas échéant, je ferais de mon mieux pour y répondre. Je vous proposerais une solution dans le prochain article.

À demain.